Dans les entreprises, il est courant que la part variable de la rémunération soit liée à la réalisation d’objectifs. Emmanuel Labrousse, un responsable du groupe de travail Social de Walter France, rappelle que ceux-ci doivent être fixés en début d’exercice. Faute de quoi, que les objectifs soient réalisés ou non, l’employeur devra verser la part variable à son salarié.
Pour rappel, un employeur ne peut fixer et modifier des objectifs définis unilatéralement dans le cadre de son pouvoir de direction qu’à deux conditions : d’une part, les objectifs fixés doivent être réalistes et réalisables, faute de quoi il ne peut être reproché au salarié de ne pas les avoir atteints ; d’autre part, les objectifs doivent être portés à la connaissance du salarié en début d’exercice, sauf si des circonstances particulières rendent impossible leur fixation à cette date, ce que le juge doit contrôler. Peu importe que leur modification ait une incidence favorable ou défavorable sur le montant de la rémunération variable. Dans une affaire jugée le 31 janvier 2024*, la Cour de cassation rappelle que l’employeur peut modifier des objectifs qu’il a fixés unilatéralement, mais à condition d’en informer le salarié en début d’exercice. À défaut, la part variable lui est intégralement due.
Fixer des objectifs en cours d’exercice ne suffit pas
En l’espèce, un salarié réclamait le paiement de l’intégralité de sa part variable, sur le principe qu’aucun objectif ne lui avait été fixé à son arrivée dans l’entreprise. L’employeur avait précisé que son salarié avait pourtant été informé des objectifs à atteindre en cours d’exercice, ce qui avait conduit la cour d’appel à débouter le salarié de sa demande. Dans cette affaire, l’employeur avait prévenu le salarié seulement en novembre que ses objectifs seraient revus en janvier, et ce, pour un exercice d’octobre N à septembre N+1.
L’employeur devra payer l’intégralité de la part variable
De son côté, la Cour de cassation considère que lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, ils doivent être réalisables et portés à la connaissance du salarié en début d’exercice. À défaut, le montant maximal prévu pour la part variable doit être payé intégralement au salarié comme s’il les avait réalisés. Elle a donc cassé et annulé l’arrêt de la cour d’appel. Selon elle, l’employeur doit verser la part variable de sa rémunération à son salarié. Pour Emmanuel Labrousse : « Attention donc, même de bonne foi, l’entreprise peut être condamnée à verser sa part variable à son salarié, si elle a négligé de lui fixer ses objectifs en tout début d’exercice. »
* Cour de Cassation 31 janvier 2024 n° 22-22709F-D