Biosourcée, biodégradable, aux parfums goyavier, letchi, mangue, vanille… Spécialisée dans les produits lubrifiants et dépolluants, l’entreprise européenne de chimie appliquée (EECA) prend le virage d’une nouvelle diversification en lançant au mois de mai une gamme de liquide pour vaisselle écologique aux parfums péi. Celle-ci lui ouvre le marché domestique des produits d’entretien, jusqu’ici domaine réservé des importations.
En se développant sur le marché des détergents, c’est plus qu’une niche d’import-substitution que s’apprête à investir EECA, entreprise basée au Port, fondée en 1997 par Dominique Rio, surtout connue pour sa marque Eller. Après la fermeture de la SIB en 2013, le marché des produits d’entretien est retourné aux importations. EECA y a ouvert une première brèche, il y a un an et demi, en produisant du liquide vaisselle en format 5L pour le compte du réseau Leclerc. Un produit populaire qui marche très bien. EECA franchit le pas de la diversification en investissant dans la fabrication de flacons en plastique et dans une nouvelle chaîne de conditionnement pour pouvoir proposer une gamme plus large de produits pour vaisselle. Des travaux d’agrandissement de ses locaux et des équipements énergétiques complètent l’investissement de 800 000 euros, soutenu par une aide de France Relance couvrant 50 % de la dépense. Avantage du projet : l’importation de la matière première seule réduit l’empreinte carbone du fret. De plus, la matière première d’EECA est biosourcée pour garantir un produit biodégradable. Des créations d’emploi accompagneront la montée en puissance de la production. Quant aux parfums péi, plus familiers aux Réunionnais que la pomme, ils apportent une touche supplémentaire d’inédit au produit.
Une entreprise trentenaire
Plutôt discrète jusqu’à présent, EECA fait partie du club des « trentenaires » de l’industrie réunionnaise. C’est un fleuron méconnu de la production locale. En fondant son entreprise, Dominique Rio apportait à la Réunion une expérience de 20 années dans la gestion des hydrocarbures au service des armées françaises. Son projet : la production locale d’huiles de moteur, bastion exclusif de l’importation. Bousculant les places acquises, sa marque, Eller, fit très vite l’objet d’une campagne de dénigrement vigoureuse et efficace qui l’incita à battre provisoirement en retraite, mais qui fut, paradoxalement, à l’origine des diversifications successives qui ont fait le succès de l’entreprise. Un mal pour un bien en quelque sorte. « Dans les années 2012-2013, nous nous sommes demandé qu’elle était exactement notre métier. Nous nous sommes dits que nous n’étions pas des fabricants d’huile mais une entreprise de parachimie pouvant mélanger beaucoup d’autres choses » explique Dominique Rio pour lequel « EECA promeut une parachimie responsable ».
Une championne de l’import-substitution
EECA, qui emploie aujourd’hui 30 personnes, est une entreprise de référence pour plusieurs secteurs d’activité. Les lubrifiants restent sa spécialité première : pour véhicules légers et véhicules industriels, engins de travaux publics, matériels agricoles, bateaux de pêche de haute mer, équipements industriels, etc. Une dizaine de marques au total auxquelles s’ajoutent, pour les professionnels, divers produits de protection de l’environnement comme les cuvettes de rétention et les absorbants. Pour l’automobile, EECA produit liquide de refroidissement, liquide lave-glace et eau déminéralisée. Diversifiée dans les dépolluants, elle développe deux fabrications locales importantes : la production sous licence de l’AD Blue, dont EECA détient 80 % du marché (elle approvisionne les réseaux de stations-services Vito, Engen et Ola), ainsi que la production de nitrate de calcium, servant à neutraliser les nuisances olfactives des eaux usées traitées par les stations d’épuration. Au total, 250 références figurent au catalogue d’EECA, dont une centaine de lubrifiants. Le taux de croissance de l’entreprise est d’environ 20 % par an (51 % en 2021, année de rattrapage du confinement). Les produits Eller et Mi M mon Caz sont estampillés Nou la fé. Nul doute qu’il en sera de même, à brève échéance, pour les nouvelles marques de liquide pour vaisselle péi.
Le flaconnage, un nouveau métier pour EECA
A l’origine du nouveau projet d’EECA, il y a donc cette demande de Leclerc à La Réunion : le distributeur souhaitait proposer à sa clientèle un liquide vaisselle en grand format familial sous une marque propre de fabrication locale. Ainsi est née la marque Mi M mon Caz, distribuée exclusivement dans les magasins Leclerc. Avec ses nouveaux équipements, EECA maîtrise désormais non seulement les mélanges, son métier industriel de base, mais leur conditionnement en produisant ses propres flacons à partir de préformes. L’entreprise prévoit de commercialiser trois autres formats de liquide vaisselle, en plus du bidon de 5L, aux parfums péi dans des conditionnements transparents, modernes et esthétiques. Une montée en gamme qui ouvrira la voie, ensuite, à d’autres produits : liquide vaisselle concentré, lessive liquide, assouplisseurs, nettoyants pour sols et murs, etc.