Lorsque vous générez des images via Midjourney pour vos campagnes publicitaires, vous êtes-vous déjà demandé si votre concurrent pouvait les reprendre ? Est-ce que je peux vendre un livre écrit entièrement par Bard et toucher des droits d’auteur ? Si je suis artiste sur Leonardo.ai, puis-je attaquer pour plagiat ? Les frontières de la créativité sont en train d’être redéfinies par l’intelligence artificielle, et avec cela émergent des questions cruciales sur la propriété intellectuelle.
Je prompte un poème, à qui appartient-il ? À moi, parce que j’ai prompté ? À Open AI parce qu’il a entraîné le modèle de langage ? Aux auteurs des textes qui ont permis au modèle de s’entraîner ? À personne ? Souvent, lorsque je pose ces questions, les personnes prennent conscience qu’elles n’ont pas les réponses. Puis, ceux qui sont un peu au fait me répondent fréquemment : « L’AI Act réglera cela. »
AI Act
L’AI Act est un projet de législation porté par l’Union européenne depuis 2021 afin de réglementer l’écosystème de l’intelligence artificielle. Elle vise principalement à mesurer « la dangerosité des IA » via une pyramide, allant du risque minimal (filtre spam, jeux vidéo, etc.) aux risques inacceptables, à son sommet, tels que le scoring social, la reconnaissance faciale ou encore la surveillance de masse. À l’instar de ce que les Européens ont fait avec la RGPD (Réglementation générale de la protection des données), l’objectif de l’Europe est de légiférer.
2024, l’année des procès
Nous sommes actuellement dans un vide juridique ! À l’heure actuelle, peu de personnes ont des réponses, et les cabinets d’avocats spécialisés reçoivent de nombreuses demandes. Pour rassurer leurs clients et utilisateurs, des sociétés telles que Microsoft, Open AI, ou encore Canva se sont engagées à proposer une protection juridique en cas de litige. Mais dans ce flou juridique, 2024 s’annonce comme l’année des procès. Les défis entourant la propriété intellectuelle liée à l’intelligence artificielle vont de pair avec l’émergence de nouveaux cas, nécessitant des tribunaux et des juristes pour trancher dans des domaines où les règles ne sont pas encore claires.
L’Opt-out et les questions éthiques
L’émergence de l’intelligence artificielle générative pose également des questions éthiques cruciales, notamment en ce qui concerne le consentement de la fouille des données. Sans données, on ne peut pas entraîner un modèle de langage ou un modèle de diffusion (les IA qui génèrent des textes ou des images pour faire simple). L’Opt-out, une pratique où les sites web (par exemple ceux de la presse) insèrent du code afin que les robots ne se servent pas dans ses archives, etc., devient un sujet central. Cependant, une préoccupation majeure est que de nombreux modèles d’IA ont déjà été entraînés sans le consentement explicite des créateurs de contenu. Des corpus de données massifs ont été utilisés, englobant souvent des contenus créés par des créateurs sans qu’ils aient eu la possibilité de refuser. Cela soulève des interrogations sur la légitimité de l’utilisation passée de données : les créateurs devraient-ils être consultés rétroactivement pour obtenir leur consentement ?
En fin de compte, le défi consiste à trouver un équilibre entre l’innovation technologique et le respect des droits individuels. L’intelligence artificielle n’est pas seulement une rupture technologique, elle est également une rupture dans la façon de légiférer.