L’ADIR a signé le 16 février dernier avec les enseignes de distribution locales une charte d’engagement pour le soutien à la création de valeur par le développement de la production locale dans la distribution alimentaire. L’initiative vise à favoriser le dialogue entre les acteurs de la grande distribution et les fournisseurs locaux.
Cette signature s’est faite sous l’égide et en présence du préfet de la Réunion, des présidents des conseils régional et départemental et avec l’approbation des interprofessions du secteur primaire. Cette charte, adoptée pour une durée de deux ans, a pour objectif de développer la présence et la visibilité de la production locale dans la grande distribution à La Réunion. Les signataires s’engagent à mettre en œuvre toute une série d’actions pour valoriser et développer la production locale, mieux exposer les produits locaux, mais aussi apporter une réponse aux attentes des consommateurs réunionnais en termes de prix et de diversité de l’offre. Cela nécessitera un investissement des producteurs dans la productivité, la qualité des produits en termes de sécurité alimentaire et de traçabilité des produits. Sont également mis en avant le sujet de l’emploi et de la fierté d’un territoire à produire et à consommer ce qu’il produit.
Montée en gamme et visibilité de l’offre locale
La Charte prévoit d’adapter la production « pour tenir compte de manière optimisée des attentes du marché (offre de produits, qualité, sécurité, prix, volumes) dans le respect des contraintes de la distribution propres au territoire réunionnais, avec notamment la mise œuvre (…) d’actions visant à l’amélioration et la montée en gamme de l’offre alimentaire et plus généralement de l’offre en Produits de Grande Consommation. » Les industriels s’engagent ainsi à « offrir, pour tout produit importé, une alternative au consommateur par référencement d’une offre locale équivalente ». Pour renforcer la visibilité de la production locale, il est prévu « la mise en place d’une identification de la production locale (balisage, étiquette de prix adaptée à la demande du consommateur, communication et opérations commerciales des enseignes, soutien financier, etc.) au travers des marques comme Nou la Fé (…) ». La visibilité s’appuiera sur « une politique de promotion des marques et produits locaux soutenue, tant en ce qui concerne le nombre de produits retenus, leur présence en catalogue que leur mise en avant dans les magasins (…) »
Promotion, innovation, export
Sur la question des promotions, les enseignes de grande distribution s’engagent à « assurer une politique promotionnelle et de marge responsable à l’égard de la production locale pour lui permettre son développement ». Elles s’engagent également à soutenir l’innovation « par une politique de référencement et d’exposition favorable aux produits innovants de la production locale », ainsi qu’à soutenir l’export par un « soutien actif des démarches de la production locale, vers leurs partenaires, société mère ou filiales en métropole, dans les autres DOM ou tout autre pays étrangers. »
Des indicateurs de suivi
Il est demandé aux enseignes de la grande distribution de « définir individuellement et en toute indépendance un plan marketing permettant la mise en œuvre de ces engagements ». La Charte rappelle à ce titre que « chaque industriel demeure totalement indépendant et libre dans le cadre des négociations commerciales avec ses clients/distributeurs ». Autre proposition de la Charte : la définition et la mise en place des « indicateurs macro-économiques et business du poids de la production locale » dans l’offre de la grande distribution. « Ces indicateurs pourront porter, notamment, sur le nombre de références, le facing, la présence dans les promotions, de la production locale. » La Charte prévoit ainsi la constitution d’un groupe de travail « Indicateurs » qui comptera parmi ses membres un « tiers indépendant », garant de la neutralité des modalités pratiques de détermination et d’application des indicateurs.
« Il s’agit d’initier un cercle vertueux »
Directrice commerciale et marketing du groupe Chatel, Julie Chatel est en charge du suivi de la Charte au sein de l’ADIR.
Que s’est-il passé depuis la signature de la Charte, le 16 février ?
Nous avançons dans la mise en place du groupe « Indicateurs ». Le choix du « tiers indépendant » est à l’étude. Le tiers indépendant ne doit faire partie ni de l’industrie ni de la grande distribution. Nous avons pressenti plusieurs candidats. Nous attendons la validation des parties signataires de la Charte. Nous travaillons également à la définition de la liste des produits locaux. L’ADIR et, plus largement, l’industrie locale ne sont pas les seules concernées par la Charte. Celle-ci s’applique à toute la production locale. Un des points essentiels à clarifier, c’est donc de définir ce qu’est un produit local, pour pouvoir établir la liste des produits locaux. Nous travaillons avec les différentes interprofessions pour composer cette liste.
La grande distribution et la production locale ont toujours travaillé de concert. Pourquoi ce besoin de formaliser aujourd’hui vos relations ?
C’est exact, il y a toujours eu une étroite collaboration entre la production locale et la grande distribution. Les crises récentes ont mis en évidence des enjeux qui soulignent l’importance de cette collaboration et le besoin de la consolider. La crise des gilets jaunes a exprimé l’enjeu du pouvoir d’achat local. Nous œuvrons depuis côte à côte, producteurs et enseignes, pour trouver des solutions à ce problème, qui passe notamment par l’augmentation de la productivité des entreprises industrielles locales. Après est venue la crise sanitaire avec le confinement qui ont rappelé l’enjeu, pour la Réunion, de disposer d’une production locale forte, diverse et réactive. Face à ces défis, la grande distribution marque sa volonté de se mobiliser à nos côtés via la Charte. Nous nous dotons d’une méthode pour pouvoir mieux travailler ensemble. Pour cela, nous avons besoin d’évaluer les effets concrets de cette collaboration. Ce sera la fonction des indicateurs.
L’industrie locale s’engage par cette Charte à proposer l’alternative d’un produit local pour chaque produit importé. Est-ce possible ?
On peut toujours faire plus, mais nous ne pourrons jamais nous substituer à la totalité des importations. L’idée, c’est que, lorsqu’un produit importé représente un marché significatif, la production locale soit capable de se positionner sur ce marché avec un produit d’au moins la même qualité. Mais, pour y parvenir, la production locale a besoin de la grande distribution. Il s’agit d’initier un cercle vertueux qui sera profitable à tous.