Le futur producteur réunionnais de pulpe de carton, dont l’usine sortira de terre en 2025 dans l’écoparc du Port, souhaite d’ores et déjà encourager et fédérer des projets industriels de transformation. Préformés servant au calage des produits dans les emballages, pots de fleurs, boîtes à œufs, etc. : les applications s’annoncent multiples.
« Nous sommes ouverts à tous les projets locaux pouvant utiliser la pulpe de carton recyclé pour fabriquer, par moulage ou soufflage, des produits finis à base de fibre cellulosique. Il y a pléthore d’applications possibles. Notre fibre déshydratée permettra de produire tous les types de préformés calant les produits fragiles durant leur transport. De plus, ces calages, qui sont aujourd’hui jetés dès que l’emballage est ouvert, pourront à nouveau être recyclés. Même chose pour les boîtes à œufs, les pots de semis, les supports de déchets médicaux en carton jetables. Cette pulpe pourra aussi entrer dans la composition d’isolant thermique. Et il y aura toutes les autres utilisations auxquelles nous n’avons pas pensé… » L’annonce est faite par Marijke Payet, responsable du développement durable chez Pulp Eco, et par Olivier Morel, consultant d’entreprise, qui, avec Aimery Deleflie, dirigeant de Pulp Eco, font avancer ce projet précurseur depuis cinq ans : une usine de recyclage de carton à La Réunion, qui transformera des déchets de carton en pulpe sèche ou mouillée. Ce qui les incite aussi à lancer cet appel, c’est que deux fabricants métropolitains de préformés en cellulose, ayant eu vent du projet, les ont déjà contactés…
Le recyclage du carton dans un petit territoire
Pulp Eco est une société de négoce de déchets (carton, plastique, ferraille) créée en 2019, filiale du Groupe Clinifutur*. Le projet d’une usine locale de carton recyclé a été rendu public en 2021. Outre le désir de promouvoir une solution d’économie circulaire, il est motivé par le caractère de plus en plus aléatoire du négoce de déchets. Les modifications de la réglementation européenne sur le transfert transfrontalier de déchets, qui tendent à privilégier le transfert vers les pays de l’OCDE, la fermeture des frontières de pays importateurs de déchets, le coût et les difficultés d’exportation depuis La Réunion, tout concourt à rechercher des solutions d’autonomie dans la valorisation des déchets. Les usines métropolitaines de recyclage du carton sont dimensionnées à l’échelle de l’Hexagone. Pulp Eco innove avec une usine capable d’exploiter un gisement limité de déchets de carton. Cinquante mille tonnes de cartons entrent annuellement à La Réunion. À peine 25 000 tonnes sont ensuite récupérées pour être réexportées et recyclées. Le reste finit en décharge ou disparaît. Pulp Eco aura besoin d’un minimum de 32 000 tonnes pour faire tourner ses machines en continu. L’usine pourrait être aussi alimentée par des déchets de carton de Mayotte. Elle pourra recycler jusqu’à 40 000 tonnes de carton par an.
Un savoir-faire accessible à tous
« L’usine va boucler la boucle de la filière réunionnaise du papier carton sans se substituer à ce qui existe déjà », tient à souligner Marijke Payet. Les partenaires concernés sont nombreux, à commencer par les opérateurs de tri et de traitement de déchets et l’éco-organisme des emballages Citeo. Les grands consommateurs de carton que sont la grande distribution et les industriels sont aussi à l’écoute. La pulpe de carton qui ne sera pas recyclée sur place sera exportée pour être recyclée ailleurs. L’objectif est d’aboutir à la suppression de tout enfouissement de déchets de carton à brève échéance. Pulp Eco a conscience que sa solution, une fois testée et validée, pourra être transposée dans des îles et des territoires de petites tailles confrontés à des difficultés similaires. D’où l’autre choix remarquable du projet : son refus d’être une source de profit. « Tout notre savoir-faire sera mis librement à la disposition de toute structure sérieuse et fiable, d’où qu’elle vienne, qui souhaitera le mettre en œuvre au service du développement durable », préviennent Marijke Payet et Olivier Morel.
* Le groupe Clinifutur poursuit une autre activité de développement durable avec sa filiale BA Eco, qui produit du mobilier urbain et d’extérieur à partir de matériaux plastiques et de packs de lait recyclés.