Prévue pour durer, l’inflation touche de nombreux produits de grande consommation. La société de services et d’information NielsenIQ, spécialisée dans la mesure de la consommation, analyse les performances des produits bio et en vrac, et l’impact de la crise inflationniste sur ces achats. Le contexte met en effet à mal ces pratiques vertueuses et rend encore plus stratégique leur accessibilité prix.
S’appuyant sur son expertise métier, ses données et technologies innovantes pour récolter et analyser les tendances consommateurs et distributeurs, NielsenIQ suit de très près l’évolution de la grande consommation et partage aujourd’hui les enseignements de ses dernières études consacrées au bio et au vrac en collaboration avec Réseau Vrac. Alors que les tendances vers plus de naturel et davantage de produits responsables progressaient ces dernières années, le contexte international (pandémie de Covid-19, pénuries, inflation, conflit en Ukraine) vient les ralentir. Trois consommateurs sur quatre dans le monde déclarent ainsi avoir revu leurs priorités par rapport à ce qu’elles étaient en 2019. En ce qui concerne le vrac, le contexte a son importance.
2021 fut marquée par une baisse de la consommation à domicile, un recul des ventes de produits de grande consommation tant en volume (- 2 %) qu’en valeur (- 0,3 %). Un recul qui s’explique principalement par des Caddies présentant moins de produits, avec de surcroît pour le vrac, les séquelles de la crise sanitaire. 2022 est de son côté marquée par une inflation record, les hausses de prix sur un an dépassent désormais en moyenne les 6 % pour les 12 catégories les plus inflationnistes. Huit Français sur dix surveillent désormais leurs dépenses et ne sont pas disposés à dépenser plus pour l’alimentaire, même si ce n’est pas leur premier poste d’économie.
Quelles perspectives pour les achats éco-responsables ?
Pour augmenter ses ventes, le vrac doit se rendre attractif et ne pas faire du prix une barrière additionnelle à l’achat. Bien que 82 % des Français ne savent pas ce qu’est l’Eco-Score, ils restent largement attentifs aux initiatives actuelles de consommation responsable. Par exemple, 45 % d’entre eux considèrent importants la diminution et modification des emballages (moins de plastique), le commerce équitable (51 %), ou bien les démarches respectant la santé animale (44 %). Si 31 % des foyers ont acheté en vrac en 2021, un grand travail d’éducation autour de ce mode de consommation reste à faire pour gagner le cœur et le porte-monnaie des ménages. Parmi les freins à l’achat cités par près de 60 % des Français interrogés : la préservation de la qualité des produits, l’hygiène, l’absence de marque visible ou d’informations suffisantes sur les produits. Au-delà, la moindre consommation du vrac en 2021 s’explique par un prix au kilo trop élevé (pour 26 % des répondants), l’indisponibilité du produit dont a besoin le consommateur au moment de ses achats (10 %), ou bien encore parce que le rayon n’est pas sur son parcours (11 %). Certaines de ces barrières à l’achat peuvent être plus facilement levées en mettant par exemple des contenants à disposition, des QR codes renseignant sur la qualité et composition des produits.
Le vrac porteur de solutions
Le vrac touche presque tous les consommateurs, à l’exception de ceux qui privilégient la recherche de gain de temps. Par ailleurs, 50 % des Français achètent leur vrac en privilégiant certains circuits : les grandes surfaces spécialisées bio, les supers et hypermarchés. Le vrac est entré dans les habitudes de consommation de quatre millions de consommateurs. Sur ce total, 48 % des plus de 65 ans déclarent acheter du vrac régulièrement, contre 42 % pour les moins de 35 ans. Pour les Français, le vrac restait jusqu’ici un achat économique avant d’être écologique. 35 % des personnes interrogées déclarent choisir le vrac pour acheter la quantité dont elles ont besoin, 23 % pour réduire leurs déchets (emballages), 10 % parce que cela revient moins cher. 52 % des foyers français souhaitent trouver plus de produits accessibles dans le rayon vrac et notamment pour les produits d’épicerie (69 %), d’entretien (53 %), et d’hygiène beauté (41 %). « L’inflation invite les Français à adapter leur consommation. Le vrac a un fort potentiel de croissance qui passe par un travail de fond en matière d’éducation, de signalisation, de diversification des produits disponibles… tout en restant accessible et en le faisant savoir auprès des ménages », commente Nicolas Riant, Associate Manager chez NielsenIQ. Pour Célia Rennesson, cofondatrice et directrice Générale de Réseau Vrac, « en période d’inflation, pouvoir maîtriser ses dépenses, sans renoncer à la qualité des produits tout en préservant les ressources planétaires semble compliqué. Le vrac est porteur de solutions. Il permet de réconcilier les notions de » fin du monde » et » fin du mois » que l’on considère pourtant comme antagonistes ».
Les achats de produits bio en période d’inflation
Si les ventes de produits dits conventionnels restent stables, le chiffre d’affaires du bio recule de 6 % en circuits généralistes (hypers, supers, proximité, e-commerce et SDMP*) en ce début d’année 2022. Après une année de baisse en 2021, les ventes de PGC Bio (en valeur) devraient malgré tout s’orienter selon les projections vers une stabilité en 2022 (5 965 000 euros, 5 991 000 euros en 2021). Le poids du bio n’augmente plus sur les rayons hygiène/beauté (4,3 % en 2022, 4,4% en 2021) et baisse sur le frais laitier (8,7 % en 2021, 8,2 % en 2022) comme sur le frais non laitier (charcuterie, traiteur) : 4 % en 2021, 3,6% en 2022. Le développement de l’offre bio en magasin, qui portait la croissance des dernières années, s’essouffle nettement (+ 0.2 % d’offre depuis le début d’année). Pour Pauline Peyron, consultante chez NielsenIQ, la question du prix a et aura un impact très différent selon la clientèle concernée : « Si les produits bio sont globalement moins impactés par l’inflation que les références conventionnelles, ils restent en moyenne 30 % plus chers.
Les consommateurs les plus modestes et familiaux risquent ainsi de continuer à délaisser ces produits mieux-disants face à leur baisse de pouvoir d’achat.
Mais les plus gros consommateurs de bio, plus aisés, urbains et moins impactés par l’inflation, devraient continuer à accorder une part non négligeable au bio dans leurs achats de produits alimentaires. » À titre d’illustration, les foyers franciliens, certainement moins sensibles à la hausse du prix de l’essence, n’ont baissé cette année leurs achats de bio que de 0,6 %, contre moins 3.6 % sur le reste du territoire.